Parole de citoyen(e)s : Les gilets Roses

Déjà le deuxième numéro pour notre toute jeune rubrique participative : Parole de citoyen(ne)s. Aujourd'hui ce sont les Gilets Roses (assistant-e-s maternel-le-s) qui prennent la parole et nous proposent la lettre ouverte qu'ils et elles ont adressé aux ministres, députés, sénateurs et maires de France, concernant notamment la réforme cumul emploi-chômage. On comprend mieux la colère et surtout l’inquiétude qui les anime concernant l'avenir de cette profession particulière et indispensable. Par ailleurs nous vous rappelons que les assistant(e)s maternel(le)s seront à nouveau mobilisés le 30 mars sur toute la France, et pour la Normandie, ce sera à Evreux, avec un départ place Dupont de l'Eure à 10 h 30 pour un défilé à 10 h 45 vers la rue Chartraine, après deux premières journées sur Rouen, donc si vous désirez les soutenir, n'hésitez pas.
La lettre ouverte des assistant(e)s maternel(le)s :
Collectif des Assistants Maternels En Colère, « Gilets Roses » et le Collectif des Assistants Maternels du 27 et 76
A l'intention de
Mesdames Pénicaud (ministre du travail) et Dubos (secrétaire d'état)
Mesdames et Messieurs les sénateurs
Mesdames et Messieurs les députés
Mesdames et Messieurs les Maires
Objet : Lettre ouverte du Collectif des Assistants Maternels En Colère, « Gilets Roses »
Opposition au projet de réforme de l’assurance chômage
Le 18 Mars 2019
Mesdames, Messieurs,
Comme vous le savez, les négociations de l’assurance chômage se sont conclues par un échec. Le gouvernement a repris la main pour réaliser plus de 3 milliards d’économies sur les 3 prochaines années et « inciter davantage les personnes à retrouver du travail » et veut faire passer cette réforme par décret.
Pour cela, le gouvernement veut mettre en œuvre la baisse du niveau d’indemnisation, des carences supplémentaires, faire la chasse aux chômeurs et des radiations massives.
Tout ceci attaque directement les plus précaires des chômeurs et va donc fragiliser encore plus notre profession d’assistant(e)s maternel(le)s et de manière générale, tous les salariés multi-employeurs, les salariés du service à la personne. Cela concerne tous les salariés pouvant bénéficier de l’ARE (l’allocation retour à l’emploi)
Nous sommes 327 000 assistant(e)s maternel(le)s salarié(e)s du particulier employeur en France. Notre profession est le premier mode d’accueil des tout-petits, choisi par 86% des familles, qui peuvent ainsi concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale.
Le métier d’Assistant(e) Maternel(le) ne peut être exercé qu’avec un agrément délivré par le Conseil Départemental, qui permet d’accueillir simultanément 1 à 4 enfants par jour avec des critères différents (exemple 2 enfant 0-18 ans, 1 enfant 2-18 ans 1 enfant périscolaire).
Notre métier a la particularité d’être soumis à une amplitude horaire de travail jusqu’à 13 heures par jour, et un taux horaire minimal très bas fixé à 2,82€ brut.
Nous avons une amplitude horaire sans aucune relation avec notre salaire car les contrats peuvent se faire sur des heures décalées, 7h30-13h pour l’un et 11h-20h pour l’autre soit 12h30 sur la journée.
Pour obtenir un revenu mensuel décent, il nous est indispensable de cumuler plusieurs contrats. La perte d’un des contrats est complètement aléatoire et indépendante de notre volonté (entrée à l’école, déménagement, entrée en crèche…etc...) ou sans motifs.
Le remplacement d’un contrat perdu n’est pas assuré puisque la disponibilité d’une place d’accueil doit correspondre à la demande des parents particuliers employeurs, mais aussi respecter les critères d’agrément imposés par le Conseil Départemental. Ce n’est donc pas une chose aisée pour nous de retrouver du travail. Cela peut prendre quelques semaines comme quelques mois selon les périodes de l’année et les zones géographiques.
Nous ne refusons pas de travailler mais il faut savoir que dans notre profession, à l’opposé des autres salariés, nous ne pouvons pas trouver nos employeurs dans une agence d’intérim ou sur le site de Pôle emploi, nous ne pouvons pas postuler dans une entreprise et encore moins traverser la rue pour proposer nos services !
Nous ne pouvons pas aller au devant de notre futur employeur pour lui proposer nos services. C'est le contraire qui se passe, nous devons attendre qu'un employeur se manifeste pour pouvoir postuler et quand une liste d'assistant(e)s maternel(le)s comprend plus de 200 noms, et bien nous avons une chance sur 200 d’être choisi.
Suit à nos différents courriers envoyé en janvier 2019 aux sénateurs, 2 réponses ont été donné par la secrétaire d'état Christelle DUBOS et la ministre du travail Muriel Pénicaud. Aucunes des 2 ne connaissent notre profession et sa spécificité et malheureusement les réponses étaient à côté.
Créer des RAM supplémentaires pour faciliter la mise en relation entre les parents et les professionnel(le)s ne servira à rien puisque c'est déjà les mairies ou PMI qui gèrent et que ça n'apporte pas plus d'emploi.
Nous ne recevons pas non plus d'offre d'emploi grâce au site mon-enfant.fr alors que nous sommes inscrit.
De plus, avec le projet de création de « classes » pour les enfants à partir de 2 ans, cela va devenir encore plus compliqué pour notre métier où les contrats seront alors rompus tous les 2 ans au grand maximum. (réf : Rapport HCFEA Voies de réforme des congés parentaux dans une stratégie globale d’accueil de la petite enfance du 13/02/2019)
Ce projet de réforme de l’assurance chômage nous inquiète quant aux impacts que cela va avoir :
Sur nos revenus dans un premier temps, pouvant engendrer l’arrêt de la profession pour bon nombre d’entre nous.
Pour les parents particuliers employeurs (manque de places d’accueil, moins de possibilité dans leur choix du mode de garde de leur enfant…)
Mais aussi pour les collectivités qui devront alors répondre aux demandes de mode de garde qui manqueront par la création de structure pour un budget important.
C’est pour toutes ces raisons que le Collectif des Assistants Maternels en Colère se mobilise contre cette réforme de l’assurance chômage : Nous refusons la baisse et les nouvelles modalités de calcul de l’ARE, nous refusons la précarité grandissante de notre métier et sa disparition. Cette réforme ne doit pas s'appliquer pour notre profession. Notre métier est bien trop spécifique pour que cette réforme s'applique à nous, assistant(e)s maternel(le)s.
C’est pourquoi nous vous alertons et comptons sur vous pour nous soutenir.
Nous vous sollicitons pour une rencontre afin de pouvoir en parler et répondre à toutes vos questions.
Dans l’attente de vos retours respectifs et vous remerciant de votre intérêt, veuillez agréer, Mesdames et Messieurs, nos salutations distinguées.
FONTAINE Carole, référente du collectif des assistants maternels du 27 et 76 et membre du Collectif des Assistants Maternels En Colère « Gilets Roses »
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